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L' armée à l' heure des Z par Isabelle Dubé
L’image des recrues qui se font crier après en faisant des push-up dans la boue est difficile à changer. Pourtant, depuis que les Forces armées canadiennes ont entrepris un virage vers la modernité en 2021, cet employeur n’a rien à envier aux entreprises les plus innovantes.
Leadership à la mode
À l’heure où les entreprises se demandent comment gérer les milléniaux et les Z, reconnus pour bousculer les organisations avec leurs exigences, les Forces armées canadiennes (FAC) ont adapté leur leadership pour refléter la société actuelle, explique en entrevue avec La Presse Martin Rousseau, major au bureau du Directeur – Planification du personnel militaire et de la coordination des programmes. Les membres issus de la diversité sont intégrés dans les réunions stratégiques et les cours de leadership incluent maintenant les concepts d’intelligence émotionnelle et d’intelligence organisationnelle, précise-t-il. Si la série Les armes à TVA ne fait rien pour défaire les clichés des leaders intimidateurs et tortionnaires, il s’agit d’une fiction créée pour divertir l’auditoire, rassure sa consœur Andrée-Anne Poulin, de la Défense nationale. Les leaders des Forces usent de leur autorité de façon à accomplir la mission de la Défense avec professionnalisme, dit-elle.
Transparence des tests
« Dans mon temps, le test d’aptitudes était très obscur. On ne savait pas trop à quoi s’attendre, raconte le major Martin Rousseau. Mais la génération des milléniaux et des Z demande plus de transparence. Ils veulent savoir ce qu’ils auront à passer comme test. » Un changement a été fait, tout comme pour le test des capacités physiques, qui avait lieu à l’arrivée des recrues. Les moins sportifs avaient peu de chances de le réussir et les Forces perdaient des gens de talent, affirme le major Martin Rousseau. Les recrues ont dorénavant un programme d’entraînement de huit semaines, adapté à leur condition, afin de se préparer physiquement et mentalement. La formation est aussi optimisée afin que les recrues puissent intégrer rapidement l’une des 104 fonctions de l’organisation et travailler.
Jupe pour tous
« En écoutant notre nouvelle génération, nos divers groupes et les grands vents de changement dans la société canadienne, on a fait un grand changement en ce qui concerne la tenue, explique le major Martin Rousseau, qui occupait jusqu’à récemment la fonction d’adjudant-chef du Commandement du personnel militaire. « On a enlevé le genre dans l’uniforme. La jupe est associée aux personnes de genre féminin dans la société, mais nous avons enlevé le genre. Même chose pour le manteau, qui auparavant avait une coupe pour les femmes et une coupe pour les hommes. » Depuis 2022, les hommes peuvent choisir la jupe et les femmes, le veston autrefois destiné aux hommes.
Adieu, look rasé
Les membres des Forces peuvent dorénavant s’exprimer comme ils le souhaitent avec leurs cheveux et leurs poils. Favoris, barbe, moustache, bouc, tout est permis. Aucune restriction non plus pour la longueur des cheveux. En 2024, une mise à jour a été apportée et les cheveux qui dépassent le bord inférieur du col de chemise doivent être attachés de façon à dégager le visage, explique la majore Karina Smith, sous-ministre adjointe aux Affaires publiques du ministère de la Défense nationale. « Autrefois, on n’avait pas le droit à la barbe du tout, à moins d’être un marin ou d’avoir une occupation spécifique, rappelle le major Martin Rousseau. Maintenant, tout le monde peut la porter et on a enlevé la barrière des styles, pourvu que ça soit propre et bien tenu jusqu’à un pouce de densité. »
Tatouage au visage
Plus besoin de faire une demande pour porter une deuxième bague aux doigts. Leur nombre est maintenant illimité, tout comme celui des boucles d’oreilles. Les Forces se démarquent en allant jusqu’à permettre les tatouages au visage. « C’est une très grande déviation de notre standard », précise le major Martin Rousseau. Les tatouages doivent toutefois refléter une image positive, non misogyne, et respecter le cadre de la législation canadienne. « Plusieurs dirigeants d’entreprise au Canada m’ont appelé pour me demander comment on a fait tous ces changements, raconte-t-il. Ça prend beaucoup de leadership, de réflexions et d’humilité. » Le major Martin Rousseau souligne aussi que les Forces mettent l’accent sur les qualités des membres et sur leur travail au-delà de leur apparence. « Les services que ces personnes-là vous donnent sont plus importants que leur tenue. »
Congés et environnement adapté
Les Services de santé des Forces canadiennes (SSFC) ont installé des espaces privés pour les militaires qui souhaitent tirer leur lait ou allaiter pendant leur service. Un nouveau programme rembourse les uniformes de maternité et d’allaitement. Des tampons sont offerts à la fois dans les toilettes des femmes et des hommes. De nouveaux types de congés pour raisons familiales permettent aux militaires de prendre un congé en cas d’interruption de grossesse, d’adoption annulée et de violence familiale. Il y a aussi des congés pour des raisons religieuses et un soutien accru pour les personnes ayant été victimes d’inconduite sexuelle.
L’épreuve du terrain
« On n’a pas encore essayé ces troupes-là au combat, explique un militaire de haut rang, qui n’a pas l’autorisation de parler à La Presse. Est-ce que toute cette sensibilité envers les nouveaux venus se traduira en efficacité lors d’un conflit grave ? s’interroge-t-il. En cas d’urgence, les ordres doivent être donnés de façon claire, précise, sans ambiguïté. Quand la vie en dépend, c’est le temps d’agir et non de contester », affirme-t-il en rappelant que tous les membres des Forces signent un engagement en entrant dans l’organisation. « On ne remet jamais en question la mission jusqu’au péril de sa vie. On ne peut pas dire : ouin, cette mission me tente moins, dit-il. En étant accommodant sur tout, en tenant compte de toutes les sensibilités sociales, est-ce que sur le terrain, les jeunes seront forts, voudront se dépasser et aller au-delà de leurs limites pour accomplir quelque chose de plus grand qu’eux ? »
Le mot de Louis Vachon, directeur invité
« Nous sommes aujourd’hui dans un environnement où le Canada doit réinvestir dans ses forces armées. Le talent est la ressource principale des forces armées. Oui, l’équipement est important, mais le talent passe en priorité. Étant donné les risques géopolitiques et l’urgence climatique, il faut réinvestir. Ça prend davantage de monde. Comment fait-on pour recruter les gens ? Comment fait-on pour les retenir ? »
L’image des recrues qui se font crier après en faisant des push-up dans la boue est difficile à changer. Pourtant, depuis que les Forces armées canadiennes ont entrepris un virage vers la modernité en 2021, cet employeur n’a rien à envier aux entreprises les plus innovantes.
Leadership à la mode
À l’heure où les entreprises se demandent comment gérer les milléniaux et les Z, reconnus pour bousculer les organisations avec leurs exigences, les Forces armées canadiennes (FAC) ont adapté leur leadership pour refléter la société actuelle, explique en entrevue avec La Presse Martin Rousseau, major au bureau du Directeur – Planification du personnel militaire et de la coordination des programmes. Les membres issus de la diversité sont intégrés dans les réunions stratégiques et les cours de leadership incluent maintenant les concepts d’intelligence émotionnelle et d’intelligence organisationnelle, précise-t-il. Si la série Les armes à TVA ne fait rien pour défaire les clichés des leaders intimidateurs et tortionnaires, il s’agit d’une fiction créée pour divertir l’auditoire, rassure sa consœur Andrée-Anne Poulin, de la Défense nationale. Les leaders des Forces usent de leur autorité de façon à accomplir la mission de la Défense avec professionnalisme, dit-elle.
Transparence des tests
« Dans mon temps, le test d’aptitudes était très obscur. On ne savait pas trop à quoi s’attendre, raconte le major Martin Rousseau. Mais la génération des milléniaux et des Z demande plus de transparence. Ils veulent savoir ce qu’ils auront à passer comme test. » Un changement a été fait, tout comme pour le test des capacités physiques, qui avait lieu à l’arrivée des recrues. Les moins sportifs avaient peu de chances de le réussir et les Forces perdaient des gens de talent, affirme le major Martin Rousseau. Les recrues ont dorénavant un programme d’entraînement de huit semaines, adapté à leur condition, afin de se préparer physiquement et mentalement. La formation est aussi optimisée afin que les recrues puissent intégrer rapidement l’une des 104 fonctions de l’organisation et travailler.
Jupe pour tous
« En écoutant notre nouvelle génération, nos divers groupes et les grands vents de changement dans la société canadienne, on a fait un grand changement en ce qui concerne la tenue, explique le major Martin Rousseau, qui occupait jusqu’à récemment la fonction d’adjudant-chef du Commandement du personnel militaire. « On a enlevé le genre dans l’uniforme. La jupe est associée aux personnes de genre féminin dans la société, mais nous avons enlevé le genre. Même chose pour le manteau, qui auparavant avait une coupe pour les femmes et une coupe pour les hommes. » Depuis 2022, les hommes peuvent choisir la jupe et les femmes, le veston autrefois destiné aux hommes.
Adieu, look rasé
Les membres des Forces peuvent dorénavant s’exprimer comme ils le souhaitent avec leurs cheveux et leurs poils. Favoris, barbe, moustache, bouc, tout est permis. Aucune restriction non plus pour la longueur des cheveux. En 2024, une mise à jour a été apportée et les cheveux qui dépassent le bord inférieur du col de chemise doivent être attachés de façon à dégager le visage, explique la majore Karina Smith, sous-ministre adjointe aux Affaires publiques du ministère de la Défense nationale. « Autrefois, on n’avait pas le droit à la barbe du tout, à moins d’être un marin ou d’avoir une occupation spécifique, rappelle le major Martin Rousseau. Maintenant, tout le monde peut la porter et on a enlevé la barrière des styles, pourvu que ça soit propre et bien tenu jusqu’à un pouce de densité. »
Tatouage au visage
Plus besoin de faire une demande pour porter une deuxième bague aux doigts. Leur nombre est maintenant illimité, tout comme celui des boucles d’oreilles. Les Forces se démarquent en allant jusqu’à permettre les tatouages au visage. « C’est une très grande déviation de notre standard », précise le major Martin Rousseau. Les tatouages doivent toutefois refléter une image positive, non misogyne, et respecter le cadre de la législation canadienne. « Plusieurs dirigeants d’entreprise au Canada m’ont appelé pour me demander comment on a fait tous ces changements, raconte-t-il. Ça prend beaucoup de leadership, de réflexions et d’humilité. » Le major Martin Rousseau souligne aussi que les Forces mettent l’accent sur les qualités des membres et sur leur travail au-delà de leur apparence. « Les services que ces personnes-là vous donnent sont plus importants que leur tenue. »
Congés et environnement adapté
Les Services de santé des Forces canadiennes (SSFC) ont installé des espaces privés pour les militaires qui souhaitent tirer leur lait ou allaiter pendant leur service. Un nouveau programme rembourse les uniformes de maternité et d’allaitement. Des tampons sont offerts à la fois dans les toilettes des femmes et des hommes. De nouveaux types de congés pour raisons familiales permettent aux militaires de prendre un congé en cas d’interruption de grossesse, d’adoption annulée et de violence familiale. Il y a aussi des congés pour des raisons religieuses et un soutien accru pour les personnes ayant été victimes d’inconduite sexuelle.
L’épreuve du terrain
« On n’a pas encore essayé ces troupes-là au combat, explique un militaire de haut rang, qui n’a pas l’autorisation de parler à La Presse. Est-ce que toute cette sensibilité envers les nouveaux venus se traduira en efficacité lors d’un conflit grave ? s’interroge-t-il. En cas d’urgence, les ordres doivent être donnés de façon claire, précise, sans ambiguïté. Quand la vie en dépend, c’est le temps d’agir et non de contester », affirme-t-il en rappelant que tous les membres des Forces signent un engagement en entrant dans l’organisation. « On ne remet jamais en question la mission jusqu’au péril de sa vie. On ne peut pas dire : ouin, cette mission me tente moins, dit-il. En étant accommodant sur tout, en tenant compte de toutes les sensibilités sociales, est-ce que sur le terrain, les jeunes seront forts, voudront se dépasser et aller au-delà de leurs limites pour accomplir quelque chose de plus grand qu’eux ? »
Le mot de Louis Vachon, directeur invité
« Nous sommes aujourd’hui dans un environnement où le Canada doit réinvestir dans ses forces armées. Le talent est la ressource principale des forces armées. Oui, l’équipement est important, mais le talent passe en priorité. Étant donné les risques géopolitiques et l’urgence climatique, il faut réinvestir. Ça prend davantage de monde. Comment fait-on pour recruter les gens ? Comment fait-on pour les retenir ? »